Résumé de l'histoire (spoile les premiers épisodes):

France, de nos jours. Une jeune femme blonde se rend à un rendez-vous étrange, qui lui a été donné par une jeune fille dans un bâtiment en construction. Ambiance tendue, typique d'un film noir (:-)). A peine la première aperçoit-elle la seconde, perchée sur une poutrelle, les yeux perdus sur un petit objet qu'elle tient en main, les deux femmes sont attaquées par une vingtaine d'hommes en costumes noirs (et chemise blanche, et lunettes noires, je parie que vous les avez tous reconnus), qui donnent l'assaut dans les règles.

En quelques secondes on est au parfum: la mignonne petite blonde, Mireille, est un sweeper du milieu, et un des meilleurs, sinon la meilleure, du milieu européen. Quant à l'autre jeune fille, Kirika, on ne sait pas grand chose d'elle, parce qu'en fait... elle non plus. Il ne lui reste que trois choses de son passé: une aptitude à tuer qui vaut largement celle de Mireille... Une petite montre à gousset, avec une gravure sur le couvercle représentant deux femmes habillées de nuages portant une épée. Et un nom: Noir, un nom célébrissime dans le milieu, donné à un duo de jeunes femmes pratiquement invincibles. Kirika a fait le voyage du Japon pour rencontrer Mireille, dont elle connaît une partie du passé, et se retrouve devant la preuve qu'elle cherchait: Mireille possède exactement la même montre, frappée du même sceau, et jouant la même musique. Elle, et elle seule, peut l'aider à comprendre qui elle est. Problème: traumatisée par son enfance, Mireille a oublié sa Corse natale et a tiré un trait sur son passé.

C'est le début de la fondation d'une équipe de sweepers, qui va redonner ses lettres de noblesse au nom de code "Noir", tout en cherchant, dans les recoins les plus obscurs des nuits parisiennes, quelle est cette parcelle de passé qui leur est commune.

Première impression:

Le générique (quelconque à mon avis) passé, j'ai eu une petite inquiétude bien passagère en découvrant celle qui ne pouvait être que l'héroïne, et son milieu: une grande blonde à Paris. Vu par des japonais, je craignais le pire.

Et bien non, si le Paris de Noir est très photogénique (voire carrément le Paris de Doisneau (LOL)), il n'y a que peu de clichés de la vie parisienne vue par l'objectif d'un appareil photo de touriste. Et ces clichés ajoutent un peu de légèreté dans une histoire globalement triste et sombre, drame silencieux et très introspectif qui s'étale sur toute la vie de ces deux jeunes femmes.

A la fin du premier épisode, je me suis dit que j'allais aimer cette série: ambiance à couper au couteau, personnages avares de mots, décor très bien planté, et un bon profil pour entamer un scénario profond (quête d'un passé oublié).

Vers le dizième épisode j'étais totalement accro, et au 26e et dernier j'avais élu, et pour un long moment, cet anime, comme étant mon préféré et de très loin. Aujourd'hui il a peut-être une belle concurrence avec Elfen Lied, mais ils sont trop différents pour vraiment les comparer. Noir est une plongée en apnée dans l'univers de la mafia européenne et ses liens avec des milieux occultes, Elfen Lied une histoire d'amour impossible.

Il m'est donc très difficile d'écrire une première impression (sans être redondant avec les thèmes qui vont suivre), puisque Noir n'est pas l'anime qui vous scotche au premier épisode et vous laisse reprendre votre respiration après. Il commence relativement classiquement, doucement même, (mais ça ne veut pas du tout dire que ça traîne en longueur!), mais une chose est sure: la montée en puissance est exponentielle et la chute n'intervient qu'à la dernière seconde du dernier épisode.

Je puis simplement dire ceci: Noir, c'est la réunion du drame de deux vies, un drame vécu intérieurement, en silence, loin de la furie du monde de l'ombre, qui est omniprésent mais que les héroïnes traitent avec détachement. Ce n'est pas non plus ni violent ni gore: tout est très épuré, pas une trace de sang, et pas de pathos non plus: le client est la plupart du temps inconnu du spectateur, la cible rapidement et proprement éliminée, et surtout, le travail de Noir n'est absolument pas le centre de l'anime! A peine présent dans les premiers épisodes pour présenter le quotidien des personnages, il est ensuite totalement occulté par la quête des deux héroïnes, qui cherchent l'essentiel: leurs origines, ce qu'elles sont, et le lien qui les unit.

Critique Technique:

Graphisme:

Oh que c'est beau (et non, d'avance pour les pervers qui connaissent la série, je ne m'extasie pas devant la beauté de Mireille qui goûte un instant de paix sur un transat en maillot de bain!) Globalement simple, sobre, ni chargé ni trop pauvre, c'est une référence, à l'instar de Cowboy Bebop.

La palette des couleurs est, et c'est surprenant, très riche, et si les nuits sont sombres, les journées ne manquent pas de couleurs vives, d'ensoleillement (oui les japonais doivent voir Paris l'été :d ), de fleurs, bref de couleurs vives et gaies, en contradiction avec l'ambiance de la série. Comme si l'auteur désirait préserver le moral de l'auditoire... Bon,en même temps, rien qu'avec Mireille ça l'aurait fait!

Animation: fluide, réussie, elle a la qualité centrale d'une animation pour ce genre d'anime: on l'oublie, elle est transparente pour laisser à l'histoire et aux personnages le soin de se révéler. (Désolé je reprends mais c'est parce que je ressens la même chose!)

Musique: Un très gros bon point de la série. Une BO magistrale (à part les génériques un peu passe-partout) signée Yuki Kaijura (une compositrice, oui mesdames, de toute façon cet anime est avant tout une histoire de femmes!), qui oscille entre mysticisme, mélancolie, mais aussi action rythmée et de temps à autres (si si) une mélodie gaie et avenante. De manière centrale, la musique est profonde, omniprésente, elle est même un élément scénaristique majeur, comme (si si, j'ose) pour des films du genre des westerns de Sergio Léone ou des deux trilogies de Star Wars. Porteuse de toutes les émotions des héroïnes, cette BO est déjà un régal à elle seule, et, à mon avis, largement au niveau de celle de n'importe quelle superprodcution cinématographique. Si les BO de Saint Seiya et de City Hunter ont marqué les années 80, celle de Noir est l'une de celle qui a marqué les années 90.

Voix VO: Les seiyyu sont parfaites. Rien de plus à ajouter. L'écueil de donner une voix de petite fille à Kirika a été évité, et Mireille a la voix mûre d'une jeune femme déjà trop marquée par la vie. Et aucun des autres personnages n'a une voix remarquable... ce qui est le but!

Critique Scénaristique (spoilers!):

Gros morceau aussi, le scénario. Si les premiers épisodes montrent le quotidien de la vie des deux sweepeuses, la découverte d'une page d'un vieux manuscrit, remontant au 10e siècle de notre ère, va les amener aux racines de la mafia, puis du monde moderne, de société secrète en sectes catholiques, en passant par ce genre de club de vieux milliardaires qui dirigent le monde derrière des pantins gouvernementaux... Bon, je vais pas vous faire un dessin, c'est presque un portrait au graphite des "maîtres du Monde", comme les appellent les alter-mondialistes de tout poil.

En parallèle, tandis qu'elles suivent cette piste, elles sont prises dans un jeu du chat et de la souris: puisqu'elles en savent beaucoup trop pour des exécutantes de basses besognes, on va leur coller sur le dos des exécutants de basses oeuvres tout aussi qualifiés mais bien plus dévoués...

Sur une troisème piste, Mireille, puis Kirika, redescendent les marches de leur infernal passé, d'épisode en épisode. Ceci est très bien symbolisé par une scène qui apparaît dans chaque épisode: un cauchemar d'enfance de Mireille, toujours la même scène, toujours la même musique (celle de la montre à gousset), et, à chaque fois, cinq secondes de plus qui dévoilent petit à petit l'horrible passé de ce petit bout de femme qui a grandi trop vite...

Au final, tout est exposé, tout est compris, et le moins que l'on puisse dire c'est que ça n'est ni simple ni réjouissant. Les trois lignes de l'intriguent se nouent dans les cinq derniers épisodes, préparant un époustouflant final qui restera dans les mémoires de tous les spectateurs tant il suscite de vives émotions.

Quoiqu'il arrive, quelques soient les nombreuses rencontres que feront Mireille et Kirika, le scénario restera original, de rebondissement en rebondissement, hors de toute routine, et maintiendra le spectateur en éveil jusqu'au tombé du rideau... et même après!

Présentation et critique des personnages:

Ne cherchez pas un homme dans cette rubrique, il n'y en a pas. Noir est une histoire 100% féminine, et, mis à part un ou deux gros bonnets, les hommes sont en général réduits à faire une apparition furtive et à disparaître avec pertes et fracas lestés de quelques grammes de plomb. Même les adversaires vraiment dangereux de Mireille et Kirika sont des femmes. L'intrigue explique bien entendu pourquoi et comment... en temps voulu!

Encore une fois les persos secondaires féminins sont intéressants, mais je veux éviter au maximum de spoiler... Je me borne ici à présenter les deux personnages principaux.

Mireille Bouquet: Grande, blonde, les yeux gris bleu, traditionnellement vêtue d'une mini jupe noire, de bottines, et d'un pull rouge sans manches, elle est gracieuse, délicate, mais désespérément froide. Mireille est une valkyrie, une vierge guerrière qui porte la mort, pas une pin-up comme on en voit trop dans les animes. Une femme fatale, au vrai sens du terme.

Ceci mis à part, elle est taciturne, réfléchie, et assez douce, et elle n'a pas un tempérament ouvertement déprimant ou déprimée, simplement une jeune femme posée, professionnelle et efficace.

Profondément réservée dans ses sentiments, mêmes s'ils sont vifs et durs au niveau de son passé, elle semble au final assez peu européenne, et reflète beaucoup plus les qualités censées être celles d'une japonaise traditionelle.

Kirika: La coéquipière de Mireille. Jeune fille introvertie, amnésique, déprimée et déprimante. Mais on comprend mieux pourquoi par la suite! Triste au quotidien, sans émotions au combat. C'est d'ailleurs ce qui la rend le plus triste: pourquoi ne ressent-elle pas de tristesse, de colère, de peur lorsqu'elle est en danger et est amenée à tuer? Cette grosse différence avec les autres êtres humains, elle essaiera, très maldroitement, de la comprendre, de la combler, avant de comprendre d'où elle lui vient. Le final révèlera qu'elle n'est pas insensible, et lui permnettra, une unique fois dans la série, d'exprimer enfin ses sentiments en situation délicate.

Conclusion et notation:

Je ne vais pas comparer Noir à une autre série, je n'en connais pas d'autres qui pourraient lui ressembler!

Pour moi c'est un des animes fondateurs du nouveau courant "sérieux, profond, psychologique" de la japanimation, qui est celui qui m'intéresse le plus.

Que dire de plus? Mythique? Incontournable? Ca semble évident si je dis qu'il est "fondateur".

C'est une de ces fictions qui abordent des thèmes profonds, comme la nécessité d'avoir des racines, le besoin de se pardonner des fautes graves, et, malgré toutes les horreurs d'une vie si particulière que celel des héroïnes, la volonté de vivre.

Avant d'être un anime qui parler de la mort, c'est avant tout une fiction qui vous parle de l'homme. Une de celle où on peut apprendre un peu de ce grand mystère, et même, si vous la vivez pleinement, apprendre un peu sur soi.

A voir, revoir et rerevoir.... et bon moi j'en suis à ma 5e en deux ans et j'en ai toujours pas marre!

Pour la notation... Que mettre d'autre que 10/10. 11/10? Peut-être est-ce mérité...

ANIME: Noir

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