06/03/2009

J'avais prévu une séance longue et pénible, mais le fait est là: je ne sais pas "lire" mon propre corps. Mardi, je ne me sentais pas en forme, mais vendredi, ça me semblait encore pire. Et pourtant, comme à chaque "bonne" séance, tout s'est débloqué lors des haya suburis. J'ai réussi à relâcher mes épaules, à respirer, pour finalement arriver en grosse forme lors des kiri kaeshi et des exercices techniques.
Malheureusement, je n'ai pas pu concrétiser cette forme lors de geikos, puisque nous n'en avons pas fait: notre maître a en effet jugé que nous, kyudanshas, devions plutôt pratiquer les bases une bonne séance complète, en grand, en souplesse, plutôt que de faire des geikos.
Mais, heureusement, nous avons fait des choses qui m'ont autant intéressé sinon plus !
De l'intérêt de positiver: alors que certains des kyudanshas ayant déjà goûté à la compet' et s'approchant à grand pas du 1er Dan ont perdu leurs moyens, et ont fait n'importe quoi pendant la suite, j'ai pleinement profité de mon keiko en me disant dans ma tête: après tout, tu as le choix entre faire des gestes mécaniquement, ou essayer de les vivre, de les ressentir, de les peaufiner.
Astuce personnelle: le kendo en grand, c'est du kenjutsu. Peu complexe, très dépouillé, mais c'en est quand même. Puisque je me pique d'intérêt pour cet autre art martial, j'ai donc décidé de profiter de la chance que notre maître nous donnait pour faire du kenjutsu avec ceux qui le voulaient.
Bien m'en a pris ! Jamais encore auparavant je n'avais réussi à détendre mes bras et surtout mes épaules, et à kiaier avec conviction en travaillant en grand ! Finalement, au regard de cette expérience, je tire deux conclusions:
- travailler en petit n'est pas moins fatiguant, si on envoie les bras assez en arrière en travaillant en grand: on me l'avait dit, je le savais, mais entre savoir et expérimenter il y a un gouffre!
- si on est bien relâché, travailler en grand n'est pas si lent que ça.
Nous avons donc travaillé, avec quelques personnes décidées, selon une méthode qui a donné d'excellents résultats: pas de geiko, des exercices en grand. Qu'à cela ne tienne, on va faire les exercices en grand, avec l'esprit et la mentalité du geiko, c'est à dire en essayant d'appliquer zanshin et seme, et en laissant l'un ou l'autre partenaire réagir différemment de "ce qui est prévu" si l'autre commet une erreur grossière de déplacement, de timing, ou d'attitude.
L'intérêt de ces exercices a donc considérablement évolué. Exemple concret: travail de Kote Nuki Men.
Au lieu de faire un Kote "lent et bateau", faire un Kote, même en grand, avec l'intention de couper, augmente considérablement la vitesse et la qualité de son exécution... et prend par surprise un partenaire inattentif ! De même, si Aite relève les bras avant que le sabre ne s'abatte vers son poignet, rien n'empêche à ce moment de lui coller Do pour lui apprendre le bon timing !
Finalement, si tout le monde rajoute le temps d'armé, le combat se ralentit, mais la "gymnastique tactique" du combat reste dans le même temps, nécessite autant de réflexe, et donne même plus de solutions à un problème posé! Du coup, si tout le monde travaille dans le même tempo, la complexité de l'affrontement augmente.
Autre exemple: Men Nuki Do, en grand.
Exercice sans intérêt: lever le sabre sans intention de frapper Men et laisser Aite faire son Do en pensant à autre chose et en priant pour ses côtes.
Exercice intéressant: Attaquer Men franchement et avec de la volonté. Si sous la menace Aite part trop tôt, séchez-le sur Kote (et oui, même en grand, ça passe !). Si c'est encore plus tôt attaquez Do. S'il part trop tard il prendra Men. Si vous êtes pile en même temps, mais que vous avez le temps matériel, une fois les bras en l'air, de deviner son Do parce qu'il part trop tôt de côté, frappez Do également: les deux sabres vont s'intercepter, le vôtre au-dessus. Arrangez-vous pour frapper FORT près de la garde du shinai d'Aite, un petit pas de côté pour créer un autre axe d'attaque en armant, et boum, grand Men (à moins, comme me l'a fait un collègue, qu'il n'ait le temps de laisser filer son sabre sous la frappe du vôtre et ne frappe en Do presque à l'horizontal en finissant sur un genou, comme dans le kata Men Nuki Do ! ^^)!
Notre maître ne nous a rien dit lorsque nous avons fait ça, mais il n'a pas désapprouvé, même si l'exercice demandé n'était effectué qu'à 75% du temps. En tous cas, nous avons transformé quelque chose qui promettait d'être barbant pour les "meilleurs" kyushas en quelque chose d'instructif, de combattif et, cerise sur le gateau, de franchement amusant.