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Shugyo
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23 mai 2008

V- LES GARDES

a.       Garde Forte / Garde Faible

Toutes les gardes de l’escrime médiévale européenne dont je vais parler sont réversibles, et se prennent aussi bien à gauche qu’à droite. Il se distingue donc, pour chaque garde, une forte, avec le côté de la main forte en arrière, et une garde faible, avec le côté de la main faible en arrière. Pour un droitier, une garde forte se prend donc pied gauche en avant, pied droit ouvert en arrière. Par la suite je décrirais les gardes fortes pour un droitier.

b.      Le Faucon

La garde du Faucon, ou du Toit, est la garde de base de la mouvance germanique de l’escrime médiévale européenne. Elle optimise l’équilibre, réduit au maximum la fatigue, permet d’attaquer ou de contre–attaquer immédiatement. C’est une garde offensive, comme Jodan en Kendo. Elle ne menace pas l’adversaire avec la pointe de l’épée, mais rend l’appréciation des distances plus difficile (pour tout le monde !). C’est cependant celle qui permet de lancer au plus vite, et au plus fort, la quasi-totalité des attaques d’escrime médiévale. C’est donc celle-là qu’il faut maîtriser au mieux et d’abord, contrairement au Kendo où on commence (et finit !) par une garde moyenne pointe en avant (Chudan).

Cette garde se prend de diverses manières, dont deux principales :

La première et plus courante est en armant au dessus de l’épaule arrière. Le poing gauche est au niveau du côté du visage, le poing droit au-dessus du niveau du crâne. La lame est orientée à 45° en arrière, et penche légèrement vers l’intérieur. Attention, il ne faut pas reposer les bras repliés sur eux contre la poitrine et l’épaule : cela réduira l’allonge et l’amplitude de vos attaques, les rendant ainsi plus lentes, plus faibles, et moins efficaces !

La deuxième se fait en armant au dessus de la tête : le poing gauche est un poing au dessus du front, le poing droit plus haut et plus en arrière. L’arme est dirigée à 45° en arrière dans l’alignement du corps. Il faut tirer sur les bras : cette position est plus fatigante, elle peut s’avérer impossible avec certains casques, et peut s’avérer dangereuse : si on ne fait pas attention, on peut se faire mal avec un quillon qui tape le crâne au moment où on lance une attaque ! Par contre, elle ne donne pas d’indication sur le flanc qu’on va attaquer.

c.       Le Bœuf

La garde du Bœuf est une autre garde offensive haute. Contrairement à la garde du Faucon, elle offre une menace bien réelle de la pointe de l’épée qui vise les yeux de l’adversaire, la poignée plus haute que la pointe (comme les cornes d’un bœuf, d’où le nom de la garde). Par contre, elle est moins naturelle et ne permet pas d’attaques de taille aussi immédiates (par contre l’estoc est plus facile).

La position des pieds et du corps ne change pas. Les mains, par contre, sont dans l’ordre inverse de la garde haute, l’une en face de l’autre, juste au dessus du côté droit de la tête : la main droite en avant, la gauche derrière très légèrement au dessus (les poignets sont donc croisés). L’épaule gauche avance naturellement, il faut veiller à ne pas se déséquilibrer en avant. La lame de l’épée est couchée en avant, pointe légèrement plus basse que le manche, et les quillons de l’arme sont verticaux.

De cette garde, on se protège des attaques venant du haut, et on peut attaquer soit immédiatement en estoc, soit de taille, la plupart du temps au moyen de moulinets horizontaux (couronnés) complets, qui sont lents à mettre en œuvre, mais dont l’élan final et la portée sont très importants.

d.      La Charrue

La garde de la Charrue est une garde moyenne offrant un bon compromis offensif et défensif (un peu comparable à la garde moyenne du Kendo, Chudan No Kamae). La pointe menace à la gorge ou au visage, et, comme pour la garde du bœuf, les poignets sont croisés, poing droit devant, poing gauche derrière. Les poings sont au niveau de la taille, un peu comme pour une tenue de lance. Selon les gravures, les poings sont plus ou moins en arrière, parfois au même niveau que la hanche (pour le poing arrière), parfois devant le ventre (mais décalé sur le côté tout de même, ça n’est pas une garde Chudan !)

De cette garde, on se protège de toutes les attaques du côté de l’épée, haute, basse et médiane. Il est aisé d’attaquer d’estoc (passage en position Longue immédiat sur une demi-fente en poussant les bras en avant). Il est également rapide et aisé de passer de la Charrue à n’importe quelle autre garde, que ce soit pour défendre ou attaquer. C’est une garde très versatile qui permet, moyennant un petit temps de préparation, d’attaquer et de défendre sur tout le flanc armé (côté de l’épée).

e.       Le Fou

Il faut être fou pour attaquer un escrimeur en garde du fou. Il faut être fou pour attaquer un adversaire depuis la garde du fou. Voilà d’où vient le nom de cette garde essentiellement défensive. C’est une garde d’attente, qui permet de contre-attaquer ou/et de parer efficacement une initiative de l’adversaire. Les froissements sont particulièrement efficaces à partir de la garde du Fou, et le mouvement de parade permet d’armer en même temps, pour enchaîner sur une attaque immédiatement ensuite. On peut également contre-attaquer rapidement sur une intention d’attaque haute ou médiane par de prestes assauts de bas en haut avec le faux tranchant de l’épée. L’utilisation de cette garde rappelle beaucoup celle de la garde basse de kenjutsu, Gedan No Kamae.

Depuis la garde de la Charrue, il suffit de plier les poignets pour laisser la lame pointer vers le sol, à l’avant droite du pied gauche.

Ces quatre gardes sont les quatre gardes fondamentales de l’escrime médiévale européenne, et il convient de les maîtriser parfaitement, de savoir rapidement passer de l’une à l’autre, et, depuis chacune, connaître sans même y penser les possibilités d’attaques qu’elles offrent, ainsi que leurs failles. Aucune garde n’est parfaite, aussi se focaliser sur une seule est une erreur, même si la garde du Faucon est incontournable au début.

f.        Les autres positions

A côté de ces gardes fondamentales, il existe également des gardes secondaires, des positions intermédiaires, et des invites, qui sont souvent citées dans les manuels de cette époque.

On appelle garde secondaire une position offrant un compromis attaque/défense réel, mais n’étant pas considéré par les maîtres d’escrime comme aussi importantes que les quatre précitées.

On appelle invite une position de préparation d’une attaque qui n’offre aucune défense : on invite l’adversaire à attaquer en se découvrant totalement, d’où le nom de ces positions.

On appelle position intermédiaire des positions importantes, ni offensives ni défensives, qu’il convient de bien connaître.

                                                               i.      Invite de la Dame / de la Reine

Ce sont deux positions offensives totales où le corps est complètement devant l’épée.

L’invite de la Dame se prend à partir d’une garde du Faucon, où on laisse tomber l’épée dans le dos, les poings derrière la tête, afin d’amorcer un coup de taille de biais, mais avec un armé plus long et plus puissant de la lame.

L’invite de la reine est identique, à ceci près que la lame, au lieu de tomber dans le dos, est horizontale derrière la nuque. On peut depuis cette invite initier un coup latéral très brutal qui arrivera à destination avec une grande énergie.

Ces invites, très spectaculaires, sont très dangereuses pour celui qui les pratique, et sont finalement peu utilisées dans une escrime sérieuse dont le but premier est l’efficacité au détriment du spectaculaire.

                                                             ii.      Invite en Longue Queue

Semblable à la garde nippone Waki No Kamae, elle permet de dissimuler la lame de son épée à l’adversaire, tout en initiant facilement des attaques remontantes puissantes et armées de loin. On peut également rapidement passer de cette invite à la garde du Faucon dans sa version armée sur l’épaule. Cette invite se prend depuis la garde du Fou, ou, sans changer la position du corps, on inverse la position des poings : poing doit en arrière, poing droit en avant, au niveau de la hanche. Il faut tordre un peu le torse pour amener l’épaule gauche en avant et permettre ainsi la dissimulation de la lame, dont la pointe renifle le sol derrière les pieds du combattant.

                                                            iii.      Position Longue

La position longue est très importante dans toute l’escrime médiévale. Elle correspond, pour beaucoup, à la position du combattant et de l’épée après une attaque d’estoc. C’est une garde de la Charrue ou du Bœuf, épée droit sur l’adversaire, bras tendus en avant à hauteur d’épaule, pour atteindre l’allonge maximale de l’arme, et selon qu’on a fait un pas chassé ou un pas alterné, une position de jambe, à droite ou à gauche, qui est celle d’une demi fente achevée. Certes c’est la position qu’on a après une attaque d’estoc, mais c’est aussi la position à rechercher à l’impact d’une attaque de taille, quelle qu’elle soit. Attaquer le premier, de loin, avec une allonge maximale, est en effet un gage de succès non négligeable, et se priver de son allonge sous prétexte de tailler et néfaste (bien sûr il faut aussi savoir s’adapter à la distance à laquelle se trouve l’adversaire !). On lit beaucoup de descriptif d’attaque donnant en position de départ une garde et en position d’arrivée une autre : c’est impossible, à moins de travailler de trop près, ce qui annule, finalement, l’utilité principale de l’épée à deux mains, qui se trouve être la longueur! La position d’arrivée est souvent un compromis entre la garde décrite et la Position Longue, au moins avec les bras tendus et les pieds plus écartés par rapport à la garde de base.

                                                           iv.      Barrière

La garde de la Barrière est une garde à mi-chemin entre l’invite en Longue Queue et la garde du Fou. Ici on ne cherche pas à cacher sa lame, c’est simplement une garde du Fou où on présente le vrai tranchant vers l’adversaire, ce qui nécessite de tordre la chaîne articulaire des bras. L’utilité principale est de procurer un peu plus d’allonge et de vitesse que la garde du fou, au prix d’une position peu confortable et beaucoup moins défensive. Elle n’est utile que dans de rare cas.

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Commentaires
S
Trop bieng, de quoi pratiquer avec Canif en toute sécurité, c'est très clairement expliqué!
D
Mon amie m'en parlé il y a quelques jours, on peut dire que cela tombe bien. j'ajoute votre blog à mes favoris. A bientôt.
Shugyo
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